Le Dévoreur d’écume

Petit, il passait des journées entières à observer l'océan. Ses yeux fixaient le large avec une gravité silencieuse que ses amis prenaient pour une sorte d'apathie, ou d'obsession. Dès qu'une tempête venait froisser la côte, on le trouvait dans les rochers debout face à la mer, au plus près des vagues et des embruns.

Au village et dans les bourgs alentours, il fut surnommé le Dévoreur d'écume.

Déjà solitaire adolescent, adulte, il devint ermite en s'installant dans une cabane sur un petit îlot relié au continent par un chemin de pierres que seules les grandes marées découvraient.

De loin, on distinguait sa maigre silhouette, son nez crochu et on devinait son regard qui toujours auscultait la houle et l'horizon, abrité par la toison de ses sourcils hirsutes. Puis on ne le vit plus. Du tout. La mer l'avala, son corps à jamais englouti.

Toutefois, les anciens disent que son âme trouva refuge dans les brise-lames de Saint-Malo.

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Extrait de Brise-lâmes, un recueil de photo / poésie / contes marins auto-édité avec The BookEdition

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